Né en 1943, Alphonse Aubrée a grandi au milieu des prés et des bêtes à la ferme de la Hyptais à Pacé. De sa jeunesse agricole, il se remémore quelques us et coutumes propres au monde rural, teintés au fil des
années de nouvelles pratiques dont il fut parfois lui-même à l’origine.
À quoi ressemblait le travail à la ferme dans votre enfance ?
Mes parents avaient une ferme moyenne. Ma mère vendait du beurre, des légumes et des poulets aux Lices le samedi pendant que mon père allait livrer des pommes de terre chez les militaires dans la zup sud de Rennes. À la ferme, mon père travaillait beaucoup à bras. Par exemple, en hiver, il curait l’étable tous les jours et il fauchait le trèfle chaque matin pour le donner à manger aux bêtes qui restaient enfermées en cette saison. Je me souviens qu’il laissait les nids des perdrix dansles champs de trèfle. Maintenant on ne pourrait plus faire ça avec les machines.
Vous avez dû voir le travail agricole évoluer, notamment avec la mécanisation…?
J’avais fait des études agricoles à Vitré et alors je donnais des tuyaux à mon père pour évoluer. Par exemple, il ne connaissait pas la clôture électrique. Je lui avais donc conseillé ça pour que les bêtes ne partent pas. D’autres agriculteurs à côté de chez nous ont vu cette nouvelle technique et ils ont vite compris aussi que ça faisait moins de travail. Mon père était aussi un des premiers à avoir un véhicule : une 403 break. Je l’avais prise une fois, on était allés à la mer à neuf copains dans la voiture ! Sans ceintures, sans rien, ça n’existait pas. C’était vers 1963-65. Il a eu aussi un tracteur de bonne heure. Il était à essence et il fallait le démarrer à la manivelle mais c’était déjà bien d’avoir un tracteur.
Avez-vous connu la fête de la Foucherais à l’époque où c’était encore une foire à l’embauche pour les agriculteurs ?
J’ai connu la Foucherais quand j’étais jeune. Mes parents embauchaient deux commis et une bonne pour aider ma mère. L’embauche était faite pour un an. Mais mon père commençait déjà à repérer des personnes le dimanche après la messe. Les agriculteurs se réunissaient et tout en prenant le café ensemble ils essayaient de trouver le bon commis. En fait, ils posaient des jalons tout au long de
l’année. Parfois c’était les commis qui voulaient changer de ferme. Ça marchait beaucoup par le bouche
à oreille.
Quelles étaient vos distractions ?
Quand j’étais jeune homme, on se retrouvait au café avec plusieurs copains de mon âge dès la sortie
de la messe. On commençait là, puis on allait dans un autre café plus loin. L’après-midi, on jouait
au palais et ensuite on se rendait au bal. Qu’est-ce qu’on en faisait des bals, il y en avait tous les
dimanches ! C’est comme ça que j’ai rencontré ma femme d’ailleurs. À Pacé, ça avait lieu dans la salle du restaurant Guérault, le restaurant en haut du bourg. Les filles étaient autour de la salle et on allait à leur rencontre pour leur demander si elles voulaient danser. On allait aussi à Gévezé, à Vezin… Les bals finissaient vers 22h-23h et je me rappelle que les réveils étaient difficiles le lundi matin ! Ensuite, les boîtes de nuit ont commencé mais je n’ai pas connu ça…